Pour poursuivre notre voyage automobile au sein de l’héraldique, restons en Amérique, et même, à plus d’un titre, à Détroit, avec
Cadillac.
Cette marque, symbole encore aujourd’hui du luxe automobile américain, est fondée à Détroit, en 1907, par Henry M. Leland, avant de rejoindre Buick au sein de la General Motors dès 1909.
Dans sa forme actuelle, à la suite d’une série d’évolutions que nous verrons ensuite, le logo de Cadillac se présente sous la forme d’un écusson placé au centre d’une couronne de lauriers. Cet écusson peut se décrire de manière héraldique par le blasonnement suivant : écartelé : 1 et 4, d’or, à la fasce de sable ; 2 et 3 contre-écartelé : a et d, de gueules plain ; b et c, d’argent, à la fasce d’azur.
Cadillac
Disons-le tout de suite, cet écusson est sous une forme simplifiée la reprise directe des armes d’Antoine de La Mothe, Seigneur de Cadillac (1658-1730), duquel il nous faut dire quelques mots.
Tout d’abord la raison pour laquelle la marque Cadillac a utilisé son nom et donc par voie de conséquence ses armoiries s’explique par la localisation de la compagnie à Détroit. En effet, Antoine de La Mothe est le fondateur en 1701 du Fort Pontchartrain, établissement français d’Amérique qui formera le berceau de la future ville de Détroit. Le blasonnement de ses armoiries personnelles était : Ecartelé : 1 et 4, d’or, à la fasce de sable, accompagnée de trois merlettes du même ; 2 et 3, contre-écartelé : a et d, de gueules plain ; b et c, d’argent, à trois fasces d’azur.
La Mothe de Cadillac
A l’origine et jusqu’en 1970, la marque Cadillac utilisait les armoiries originales sans autre modification qu’une représentation assez courante, mais pas systématique, des merlettes en blanc. Puis, en 1970, une première étape de simplification consista à réduire à une seule fasce d’azur la charge des quartiers b et c des grands quartiers 2 et 3, pour renoncer en 2002 également à la représentation des merlettes, donnant ainsi sa forme actuelle au logo.
Les armoiries originales d’Antoine de La Mothe appellent quelques explications, car la personne d’Antoine de La Mothe elle-même appelle des explications. Tout d’abord, cet aventurier français ne s’appelait en réalité pas La Mothe et n’a jamais été Seigneur de Cadillac. En effet, fils d’un avocat au Parlement de Toulouse, il est né Antoine Laumet. Après une jeunesse passée en France comme cadet puis jeune officier dans différents régiments, avant de partir plus ou moins clandestinement et pour des raisons à ce jour inconnues, sans doute judiciaires, pour les Amériques en 1683. Arrivé en Nouvelle-France il change de nom et adopte celui d’Antoine de La Mothe, qu’il accompagne des titres d’Ecuyer et de Seigneur de Cadillac. Nous ne nous étendrons pas plus avant sur la vie de cet homme, qui sera tout de même en 1710, Gouverneur particulier de Louisiane, pour en revenir à notre sujet héraldique initial. En changeant de nom, il adopte également les armoiries que nous venons de voir et sur lesquelles nous pouvons apporter quelques commentaires. Les quartiers 1 et 4 de celles-ci, ceux aux merlettes, semblent être une interprétation personnelle, en forme de brisure par changement de couleurs, des armes de la fameuse famille d’Esparbes (Esparbès)-Lussan, qui entre autres titres possédait celui de Seigneur de La Mothe (titre situé au manoir de La Mothe-Bardigues, à côté de Toulouse), et dont le blasonnement était : d’argent, à la fasce de gueules, accompagnée de trois merlettes de sable.
Esparbes-Lussan
Pour les quartiers 2 et 3, l’origine ou plutôt l’inspiration d’Antoine Laumet n’est pas connue, peut-être s’agit-il même d’une simple création ex-nihilo, mais force est de constater la forte similarité avec les armes de Montberon, un célèbre Lieutenant-Général de l’époque, dont le blasonnement était : écartelé : 1 et 4, burelé (8) d’argent et d’azur ; 2 et 3, de gueules plain.
Montberon
On pourrait aussi imaginer que l’influence se situe dans les armes d’Albret, qui étaient de gueules plain et dans les armes de Clérembault qui présentaient un burelé (10) d’argent de sable, sachant que le jeune Antoine aurait été justement, si cette partie de sa biographie est réelle, officier aux régiments d’Albret puis de Clérembault… mais ceci n’est que pure conjecture, et l’influence réelle, si elle a effectivement existé, restera sans doute à jamais un mystère.
Clérembault
Albret